Stress, Burn-out… Quand le travail nous pousse à bout
24% , c’est le taux de salariés qui se trouvent dans un état d’hyperstress, c’est-à-dire présentant des risques pour leur santé. (1)
Laura Urban est cofondatrice de l’association Parlons travail, située dans le Grand Est (Bas-Rhin et Haut-Rhin). Avec une vingtaine de professionnels, elle vient en aide et accompagne des personnes qui souffrent de stress au travail ou de burn-out. Elle est également consultante, formatrice et coach en organisation du travail et responsable du Cabinet Laura URBAN Conseil et Formation.
Dans cet article, elle vous aide à comprendre les réactions liées à de fortes pressions au travail et à trouver des solutions.
Le stress, c’est quoi ?
Dans le langage courant, on pense systématiquement au mauvais stress. Il est très souvent considéré comme négatif. Or, la réaction de notre organisme au stress est utile. Le “bon stress” nous motive et permet d’augmenter nos capacités physiques et psychiques.
Toutefois, le stress devient négatif lorsque celui-ci s’installe. Le terme “stress” est souvent employé pour parler à la fois de la cause, de la conséquence et de la réaction.
Lorsqu’on est exposé à un agent stressant, l’organisme produit une réaction d’adaptation composée de 3 étapes :
- La phase 1, la phase d’alerte : Elle permet de réagir aux différents pics de stress que nous rencontrons au quotidien. L’organisme est capable de récupérer.
- La phase 2, la phase de résistance : Si le stress persiste, se prolonge, se répète, l’organisme entre dans une seconde phase d’adaptation dite phase de résistance. Tous les systèmes nerveux, hormonaux, immunitaires sont actifs pour lutter contre ces agressions. La durée de cette phase de résistance est fonction du niveau de stress et des capacités d’adaptation de l’organisme d’un individu (son capital ressources).
- La phase 3, la phase d’épuisement : Tous les systèmes de défense, cités plus haut, s’effondrent. L’organisme se retrouve dépassé et n’est plus capable de faire face au stress engendrant dépression ou burn-out et pathologies parfois irréversibles.
Le Burn-out, qu’est-ce que c’est ?
Le Burn-out, aussi appelé Syndrome d’épuisement professionnel, est la phase ultime du stress. Plusieurs points flagrants peuvent être alors remarqués chez les personnes souffrant de burn-out : la dépersonnalisation, un sentiment de non accomplissement au travail, une dévalorisation, une déshumanisation de la relation à l’autre, une insensibilité.
Certaines personnes résistent pendant longtemps et ne vont pas tomber dans la phase 3 car elles possèdent de bonnes capacités et se ressourcent. D’autres ne prêtent pas une attention aux signaux pourtant présents, ne se sentent pas capables de faire face, oublient de remplir leur panier de ressources jusqu’au jour où l’organisme se venge. C’est pourquoi il est important de préserver son capital santé par différents moyens (physiques et cognitifs).
Quels sont les signes qui doivent alerter un salarié ?
Troubles du sommeil (manque de sommeil, insomnie, réveils nocturnes), fatigue généralisée, maux de tête, tensions musculaires, manque de concentration et de confiance, perte de mémoire…. Les signes d’alerte au stress sont nombreux, les réactions au stress ou les manifestations du stress se situent sur trois niveaux différents :
- Les signes physiologiques : palpitations, tensions artérielles élevées, tensions musculaires, au niveau des cervicales, psoriasis…
- Les signes émotionnels : agressivité, changements d’humeurs, irritabilité, perte de mémoire et de concentration, pleurs…
- Les signes comportementaux : isolement, violences, addictions (tabac, drogue, tranquillisant…)
Quels sont les facteurs de stress au travail ?
Il y en a beaucoup… Les causes constatées systématiquement sont une charge de travail élevée, un management défaillant, un manque de reconnaissance au travail. On retrouve aussi de mauvaises conditions de travail, un environnement de travail pas adapté à l’homme (aspects ergonomiques), l’évolution de la nature du travail (passage au numérique, au virtuel), une communication peu efficace ou absente, des valeurs plus partagées, un manque d’autonomie et une pression de plus en plus accrue et le « toujours plus vite en moins de temps ».
Est-ce que l’augmentation du télétravail lié à la pandémie du COVID-19 a généré du stress chez les salariés ?
Tout dépend de l’accompagnement du télétravail… Le management à distance est très difficile. Si le travail à distance a du bon pour des salariés, pour d’autres il est angoissant. Certains ont besoin de liens sociaux et de déplacements. C’est le cas également pour les étudiants. De plus, l’incertitude et les changements dans le monde du travail sont des grandes sources de stress et forment un climat anxiogène.
Est-ce que tous les salariés réagissent de la même façon face au stress ?
Face à un évènement stressant, nous avons tous des capacités biologiques pour faire face au stress (Syndrome Général d’Adaptation Hans SELYE). Mais, il faut tenir compte des capacités globales de l’individu (cognitives, physiologiques interactives). Et, en fonction de ses caractéristiques personnelles, nous ne sommes pas tous égaux face au stress. Lorsqu’un événement stressant arrive, l’individu évalue la situation, il perçoit ou pas une menace et mobilise ou pas des capacités pour y faire face. “Quelle stratégie d’ajustement je mets en place ?”. Chacun réagit différemment et a son propre seuil de tolérance au stress. Certains mettent des stratégies d’adaptation en place, d’autres en sont dépourvus.
Quels sont les effets délétères d’un stress au travail sur la vie professionnelle et personnelle des salariés ?
Lorsque nous sommes stressés à la maison, dans notre sphère familiale, ce stress n’est pas systématiquement amené dans la sphère professionnelle. Le travail peut devenir une échappatoire, une bouffée d’oxygène. A contrario, lorsque nous sommes stressés sur notre lieu de travail, on le ramène toujours à la maison et la pression nous pousse parfois à faire des erreurs, à perdre tous nos moyens. Pour lutter contre le stress chronique et la charge mentale, il existe heureusement des techniques de récupération efficaces.
Est-ce que le stress touche tous les corps de métier ? Certaines professions sont-elles plus touchées ?
Aujourd’hui, le stress touche tout le monde et à tous les niveaux. On observe que les professions à relations d’aide, de soutien et de soin sont particulièrement très exposées, mais aussi les métiers en contact avec le public (banques, police, centre d’appels téléphoniques…).
Quels sont vos conseils pour remédier au stress généré par le travail, pour souffler et retrouver l’équilibre ?
Il faut sortir de l’isolement ! Il faut en parler et oser dire quand ça ne va plus. Mettre des mots sur ce que vous ressentez fait redescendre 50% des tensions.
Mais en parler à qui ?
Au corps médical ainsi qu’à tous les acteurs d’une organisation pouvant prévenir, réduire, les RPS risques psychosociaux (médecin du travail, ergonomes, manager et hiérarchie, ressources humaines, représentants du personnel, syndicat, CSE).
Agir avant tout sur l’organisation du travail pour repérer les sources de stress et mettre en place des solutions organisationnelles, et en parallèle agir sur les dimensions collectives et individuelles.
Chacun doit trouver son propre remède anti-stress pour se ressourcer et reprendre le contrôle pour combattre le stress au quotidien. Il est donc nécessaire de repérer les signaux d’alerte, de remplir « son panier de ressources » avec différentes techniques de gestion du stress et des émotions. Il faut les tester et les ritualiser ensuite.
“Chacun doit trouver sa méthode anti-stress”
Généralement, on conseille de pratiquer une activité sportive car elle permet de lâcher prise et de se vider la tête. Néanmoins, si le corps est déjà fatigué, vous pouvez vous tourner vers la sophrologie, la méditation, le yoga, le shiastu… Ces techniques de relaxation permettent de calmer le mental sans fatiguer le corps et font circuler l’énergie dans tout le corps.
Un autre conseil, cultiver un mieux-être régulièrement et prendre soin de soi. Prendre un bain, écouter de la musique ou encore utiliser des plantes et des huiles essentielles peuvent être une source de bien-être et d’apaisement. L’important est d’apprendre à ressentir ses émotions, à bien se connaître par des techniques de développement personnel. Il est important de travailler la confiance en soi ainsi que l’affirmation de soi (savoir dire non). Et ainsi, connaître son propre seuil de tolérance au stress.
Que peuvent faire les entreprises pour prévenir le stress au travail ?
L’employeur doit veiller à la santé et à la sécurité de ses travailleurs en mettant en place des actions de prévention, d’information et de formation. Il a une obligation de résultat. On distingue plusieurs niveaux de prévention :
- La prévention primaire, c’est-à-dire actions sur l’organisation du travail
- La prévention secondaire, avec la mise en place de stage, l’aide à la gestion du stress et des émotions
- La prévention tertiaire, avec l’intervention d’un professionnel de santé
L’objectif est de trouver des solutions à la fois sur les conditions de travail, l’organisation et le management…
Pour cela, les entreprises doivent être formées sur le management bienveillant, accompagnées sur des projets de qualité de vie au travail, de RSE, de mieux-être au travail. Les organisations doivent porter ces projets stratégiques (du CODIR jusqu’aux équipes opérationnelles) pour une meilleure performance à la fois économique et humaine.
Source :
(1) Observatoire Stimulus sur le stress au travail